Le Monde | Sophie Péters

Sophie Péters parle de présentéisme, de crainte, de dévalorisation, de démotivation, de risque de fragilisation… et conseille pour y remédier de se remettre en question, de créer… bref d’agir. Des réflexions, des constats et conseils intéressants qui font écho à mon livre « Prendre des risques pour réussir – Oser de nouvelles attitudes et manager autrement » où je parlais notamment du besoin de dépasser les peurs, de prendre des risques, de créativité, de partage … pour donner du sens à la vie.

Depuis son retour des vacances de Noël, Valérie Garance ne retrouve pas sa motivation au travail. A 38 ans, elle s’ennuie dans son poste au service Ressources humaines et rêve entre deux réunions à d’autres évolutions de carrière sans jamais réussir à s’impliquer dans son quotidien.Comme beaucoup de salariés, Valérie glisse lentement mais sûrement dans le présentéisme, le visage caché de l’absentéisme. Le salarié est présent physiquement mais psychiquement absent. Certains s’efforcent même de donner l’impression qu’ils travaillent alors qu’en réalité ils en font le moins possible.
Une présence qui traduit un désengagement. Crainte de perdre son emploi, angoisse de la précarité, difficulté à boucler les fins de mois, pression galopante au bureau, fermeture de sites, fusions et restructurations, tout concourt aujourd’hui à considérer son travail plus pour sa feuille de paye que pour une satisfaction personnelle.

« Démission intérieure »
La crainte désormais est davantage de se faire remarquer par son absence et de perdre le fil de l’information interne qui permettra en cas de coup dur de se repositionner. Mais le présentéisme a un effet non négligeable sur la productivité : n’étant pas au mieux de leur forme ceux qui jouent la carte du présentéisme ne sont guère rentables.
Une enquête de l’Université de Fribourg estime à près de 15% le taux d’employés en « démission intérieure ». Une moyenne plus faible dans les PME mais supérieure dans les administrations, les banques, et les compagnies d’assurance. Que faire ?
Valérie, tout comme d’autres, ne va pas pouvoir compter sur son entreprise. Et va devoir puiser en elle les ressources nécessaires pour remonter cette dangereuse pente, au risque sinon de se fragiliser encore plus et même de tomber malade. Son malaise indique une impasse. Ignorer ses besoins, sombrer dans la résignation, faire subir aux autres ses états d’âme causés par l’insatisfaction coûte aussi très cher…

Constat d’une panne d’évolution
De plus, l’inertie donne l’impression de ne pas avancer et dévalorise la personne à ses propres yeux. Il est essentiel de se fixer des objectifs plus personnels dans le travail présent pour retrouver sa motivation et surtout passer à l’action. Les problèmes décelés dans l’organisation peuvent fournir une belle opportunité de progresser intérieurement.
La démotivation vient souvent du constat d’une panne d’évolution. Valérie admet qu’elle a choisi de renoncer à ses aspirations dans son travail et qu’elle y adopte une attitude résignée et passive bien qu’elle donne l’impression de s’activer. Mais elle comprend que son repli ne sert pas ses intérêts. Sa prise de conscience peut l’amener à influer sur son quotidien par une nouvelle attitude.
Les passages à l’action vont permettre de se détacher peu à peu du besoin d’approbation recherché. A la condition de ne pas se laisser manœuvrer par son saboteur intérieur. Le choix de ne pas bouger sert souvent à nous protéger de nos peurs et à nous éviter le stress du changement ou de la remise en question. L’idée de passer à l’action menace la stabilité et réveille les peurs.

De l’espoir pour l’âme
Voilà pourquoi le connu soulage temporairement. Bénéfice ponctuel apporté par l’inaction en refusant la déstabilisation. Si votre travail ne vous motive plus, vous connaissez aussi le prix de votre résignation : ennui, lourdeur, manque d’estime de soi, impression de stagner dans vos fonctions professionnelles et dans vos aptitudes personnelles, tout cela vous envahit et vous déprime. Choisir de passer à l’action reste le seul remède à condition de savoir supporter les peurs inhérentes à tout changement.
Toute modification de posture, d’attitude, de croyances et de projet entrepris avec le désir de réussir atténuera les peurs et diminuera le pouvoir du saboteur intérieur, et de fait, vos inhibitions. C’est le projet de changement et sa mise en actions à petits pas qui aideront à dépasser les peurs.
La mise en mouvement et la mobilisation comportent de l’espoir pour l’âme. Elle enracinera une perception plus positive de vous-même. Passer à l’action suppose de quitter le connu pour apprivoiser peu à peu de nouveaux états entraînant avec elle des sentiments, attitudes, et comportements positifs, passant de la découverte à la créativité, à l’énergie et à l’accomplissement. Reste à livrer bataille à votre force d’inertie, à vos peurs et votre auto-sabotage.